FIGAROVOX/TRIBUNE – A Orléans, on fête les 587èmes fêtes johanniques. La ville va célébrer pendant 10 jours sa libération par Jeanne d’Arc en 1429. Pour Bénédicte Baranger, la sainte laisse le triple héritage du courage, de l’engagement et de l’esprit d’unité.
Bénédicte Baranger est la présidente de l’association Orléans Jeanne d’Arc, organisation en charge d’organiser les fêtes de Jeanne d’Arc en collaboration avec la Mairie d’Orléans. L’association veille également au maintien et la valorisation de l’esprit propre de ces festivités, qui se tiennent à Orléans depuis plus de cinq siècles, en hommage à la libératrice de la ville.
Cette année, pour la 587e fois, Orléans rendra hommage à Jeanne d’Arc. Tradition historique et populaire, les Fêtes de Jeanne d’Arc se fondent dans chaque époque. Elles tiennent compte du contexte pour demeurer au-delà des sentiments et des passions éphémères. A Orléans, elles ne sont jamais marginalisées ou dépassées. Car depuis plus de cinq siècles, les autorités civiles, militaires et religieuses assument ensemble la responsabilité de transmettre un héritage intemporel, l’esprit de Jeanne, que l’on peut évoquer sous trois principaux aspects.
L’engagement, l’action et l’unité.
Tels sont les trésors que Jeanne lègue à notre ville, et plus largement à notre pays.
Premièrement le sens de l’engagement; car l’engagement de Jeanne est incroyable. Elle, jeune fille de 17 ans, reçoit une double mission: libérer Orléans et faire sacrer le dauphin à Reims, pour l’aider à reconquérir ce qui lui a été injustement retiré. Une mission folle, confiée par Dieu à cette jeune fille qui a grandi dans les périphéries du Royaume de France. Engagée, Jeanne ne brandit pas son épée pour rien, mais bien pour cette mission, pour une vérité et pour des convictions. L’épée de Jeanne défend son étendard. Celui qui est orné du nom de Jésus et de Marie. Celui qui traverse une Terre de France meurtrie, et qui redonne espoir à un pays exsangue après tant d’années de luttes.
Pour cette jeune femme qui ne voulait pas tuer, l’épée n’a de sens que si elle accompagne l’étendard, que si elle est défend des principes. L’épée de Jeanne est un signe de fermeté dans l’engagement. L’épée de Jeanne défend son étendard.
Aujourd’hui encore cet engagement nous parle. Beaucoup trop de jeunes, de l’âge de Jeanne d’Arc, ne trouvent pas de sens à leur vie, pas d’idéal. Ils fuient. L’absence d’engagement les fait se tourner vers des absolus factices, dévoyés, ou parfois même meurtriers. Notre responsabilité commune est de faire vivre l’engagement de Jeanne et de le transmettre à cette jeunesse qui recherche, comme toutes les jeunesses de toutes les époques, un idéal vrai, un cap à suivre.
Cet engagement n’est pas pour autant abstrait. Il se traduit dans l’action. C’est le deuxième héritage que nous lègue Jeanne d’Arc.
Action, car Jeanne guide les hommes et est au service de tous. Le dialogue de Jeanne avec Dieu dans la prière lui fait choisir la place la plus adaptée, la bataille la plus juste et le chemin le plus efficace. L’action de Jeanne dévoile aux yeux du monde la légitimité qu’elle a reçue du Ciel. En la voyant passer devant, malgré les dangers, ses hommes reprennent espoir. Ils croient dans l’engagement de Jeanne, et tous se rassemblent autour d’elle.
La jeunesse de Jeanne lui donne le courage et l’audace d’agir, ce qui doit nous inspirer aujourd’hui.
Nous devons agir comme elle pour recevoir, donner et ainsi rendre vivants notre héritage historique et nos fondamentaux spirituels. En le faisant d’une manière spontanée, comme Jeanne. D’une manière convaincue, comme Jeanne. D’une manière parfois impertinente, comme Jeanne. Sans distinction, sans présupposés et sans restrictions.
Enfin, après l’action qui révèle l’engagement, le troisième héritage de Jeanne est le sens de l’unité.
Jeanne rassemble les Hommes autour d’elle. Elle s’engage pour le Bien Commun. Elle ne demande pas à ses troupes de se justifier, de se transformer, ou de prendre parti, mais simplement d’adhérer à un projet commun d’avenir et d’Espérance. Son message est permanent. C’est pour cela qu’elle est toujours actuelle.
En réalité, le message d’unité de Jeanne est une mystique ; ce n’est pas une politique. «L’essentiel est que la mystique ne soit point dévorée par la politique à laquelle elle a donné naissance» notait justement Charles Péguy dans Notre Jeunesse. Et Dieu sait combien la figure de Jeanne a été utilisée par les politiques.
Jeanne, toute Jeanne, rien que Jeanne. Telle est la mission des Fêtes de Jeanne d’Arc, la ligne qui garantira l’unité. Jeanne d’Arc dépasse les «pensées du jour», les sentiments éphémères et les modes, si rapidement démodées. Jeanne n’appartient pas à un parti d’hier, opposé à un parti de demain. Jeanne est notre présent. La permanence de son message traverse le temps au service d’une noble cause: le rétablissement de l’autorité légitime qui garantit la paix. En 2016, n’est-ce pas encore cela que notre société recherche?
Animés par cet esprit d’unité, d’engagement et d’action, les Orléanais, toujours fidèles, seront cette semaine dans les rues de leur ville pour fêter Jeanne d’Arc, leur libératrice. Que cette liesse populaire soit un témoignage pour notre société, qui plus que jamais, a besoin de retrouver le sens authentique du message de Jeanne.